Précisions sur le nouveau dispositif fiscal en matière de réévaluation libre

Précisions sur le nouveau dispositif fiscal en matière de réévaluation libre

La loi de finances pour 2021 introduit pour toutes les entreprises une mesure temporaire de neutralisation fiscale des écarts de réévaluation. Cela concerne uniquement les réévaluations libres intervenues au cours des exercices clos entre le 31 décembre 2020 et le 31 décembre 2022.

Les nouvelles règles introduites pas la loi de finances 2021 ont pour objectif de permettre aux entreprises de renforcer leurs capitaux propres sans dégrader leur trésorerie. En effet, ces règles concernent les capitaux propres susceptibles d’être grevés par des pertes comptables dues à la croissance économique.

Qu’est-ce que la réévaluation des actifs ?

Le principe de cette réévaluation est très simple. Il consiste à apporter des ajustements de valeur portant sur l’ensemble des immobilisations corporelles et financières. Les nouvelles valeurs déterminées viennent remplacer les valeurs historiques présentes dans les comptes. En résumé, le coût historique est remplacé par la valeur d’utilité du bien qui s’apprécie notamment par rapport :

  • aux valeurs de marché ;
  • à la valeur d’entrée multipliée par un indice de prix spécifique ;
  • à la valeur d’entrée recalculée par rapport à un indice de variation de prix.

L’application de cette option est libre et peut être réutilisée autant de fois que souhaitée par une société. 

Attention : une fois la réévaluation constatée, les amortissements à réaliser par la suite doivent être recalculés pour être en cohérence avec les nouvelles valeurs retenues. Un nouveau plan de dotations aux amortissements est donc à mettre en place. Ceci de manière prospective, sur la durée restante et au taux d’amortissement pratiqué avant la réévaluation. Cela aura pour effet d’augmenter la charge d’amortissement future en cas de réévaluation à la hausse.

Quelles sont les règles comptables en matière de réévaluation libre ?

C’est une option ponctuelle à l’initiative de l’entité ou prévue par la loi, et non une méthode comptable soumise au principe de permanence des méthodes. 

Le champs d’application

Cette réévaluation doit porter sur l’ensemble des immobilisations corporelles et financières. Ainsi, il est interdit de réévaluer les immobilisations incorporelles (fonds de commerce, marques, brevets) et elle ne peut être limitée qu’à certains biens (réévaluation d’un terrain pris isolément, par exemple). 

La volonté de procéder à une réévaluation libre des immobilisations corporelles et financières est une décision de gestion de l’entreprise. 

Modalités de réévaluation 

  • L’excédent de la valeur actuelle (valeur la plus élevée entre  la valeur vénale ou  la valeur d’usage) sur la valeur nette comptable de l’immobilisation constitue un écart de réévaluation ;
  • La réévaluation n’a pas d’impact sur le résultat de l’entreprise.

L’écart de réévaluation est affecté comptablement dans les capitaux propres et peut faire l’objet de réserves comptables distribuables aux associés.

La réévaluation libre des actifs immobilisés va permettre de faire apparaître au bilan des valeurs plus proches de la réalité économique. Il sera par la suite possible lors d’une décision d’assemblée générale de reconnaitre une augmentation de capital. L’attribution de cette augmentation de capital se fait dans ce cas au profit des associés existants.

 

Quelles sont les règles fiscales en matière de réévaluation libre ?

Avant la loi de finances pour 2021, le traitement fiscal était le suivant : 

  • L’écart de réévaluation, qui augmente l’actif net, constitue un produit imposable de l’exercice de réévaluation ;
  • Les dotations aux amortissement postérieurs à la réévaluation sont intégralement déductibles ;
  • La dépréciation d’un bien réévalué est déductible.

Bien que cet écart de réévaluation ne passe pas par le compte de résultat, il n’en demeure pas moins que cette réévaluation donne lieu à un traitement extra comptablement. Un produit fiscalisable devra alors être reconnu. Pour cela, l’entreprise s’engage à :

  • Calculer la plus-value ou la moins-value réalisée ultérieurement lors de la cession des immobilisations non amortissable d’après leur valeur non réévaluée.
  • Réintégrer l’écart de réévaluation afférent aux immobilisations amortissables dans ses bénéfices imposables par parts égales sur une période de :
    • 15 ans pour les constructions, plantations, agencements des terrains amortissables sur une période au moins égale à cette durée ;
    • 5 ans pour les autres immobilisations.

Les immobilisations non amortissables bénéficient d’un sursis d’imposition, alors que celles amortissables, d’un étalement d’imposition. 

Concernant les immobilisations amortissables :

  • La valeur d’attribution de réévaluation est déterminée selon les amortissements et provisions ultérieurs ;
  • Leur cession entraine l’imposition immédiate de la fraction de l’écart de la réévaluation afférent qui n’a pas encore été intégrée à la date de cession ;
  • La plus-value de cession est déterminée d’après la valeur de réévaluation de l’actif.

Fiscalement, cette option fiscale offerte par la loi de finance 2021 permet donc de reconnaitre une plus-value dans les capitaux propres tout en étalant la charge fiscale sur la plus-value sur une durée de 15 ans et 5 ans pour les immobilisations hors immobilier ou nette d’imposition pour les biens non amortissables.

Il est par ailleurs précisé que l’application de cette option n’empêchera pas en cas de besoin de déprécier par la suite les immobilisations ayant bénéficié d’une réévaluation.

Laurent COHEN
Expert-comptable associé

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